PJF- AUDITION AU FOND DU DOSSIER DE TABASKI NGOM: Moustapha Diop passe à la trappe

Moustapha Diop, député-maire de Louga, est sur le point de perdre son immunité parlementaire. Accusé d’escroquerie dans une affaire de détournement de fonds, il pourrait bientôt être entendu par la justice. Ce n’est plus qu’une question de jours, de semaines tout au plus.

A moins qu’un miracle inespéré ne vienne enrayer la machine judiciaire lancée à pleine vitesse, Moustapha Diop file tout droit vers le Pool judiciaire financier (PJF). Le maire de Louga s’apprête à devenir le prochain, ou l’un des prochains députés de la 15e législature, à voir son immunité parlementaire tomber comme une feuille morte en pleine tempête. Depuis l’éclatement de l’affaire Tabaski Ngom, du nom de l’ex-Agent comptable particulier (Acp) de la Commission de régulation du secteur de l’énergie (Crse), son nom revient comme une ombre insaisissable, cité aussi bien par la principale mise en cause que par d’autres protagonistes du dossier. Mais son immunité parlementaire l’a toujours soustrait de l’interrogatoire des enquêteurs. D’ailleurs, les policiers de la Division des investigations criminelles (Dic), qui ont auditionné Tabaski Ngom, ont mentionné noir sur blanc dans leur procès-verbal transmis au Parquet financier ce gros écueil, cet obstacle à la manifestation de la vérité. Mais ce voile de protection ne devrait plus servir de bouclier à l’ancien ministre.

«Tout est fin prêt pour la saisine de l’Assemblée nationale»

Selon des informations de L’Observateur, la levée de l’immunité parlementaire du maire de Louga n’est plus qu’une question de jours, de semaines tout au plus. La procédure avance, conduite par l’agenda feutré de la justice et la pression d’une enquête dont chaque étape rapproche le maire de Louga du Collège des juges d’instruction du Pool judiciaire financier, qui souhaite l’entendre sur le fond du dossier. Un compte à rebours silencieux semble s’être enclenché depuis que le président des magistrats instructeurs a saisi le procureur financier, qui, à son tour, a saisi le procureur général, lequel a remonté l’information jusqu’au ministre de la Justice. Du côté du ministère, où la mesure envisagée devrait aboutir à une saisine de l’Assemblée pour la levée de l’immunité parlementaire de Moustapha Diop, «tout est fin prêt pour que l’Assemblée nationale reçoive la lettre dans les plus brefs délais», confie à L’Observateur une source très au fait du dossier.

L’AFFAIRE. A l’origine de ce dossier qui a fait l’objet d’ouverture d’une information judiciaire par le Collège des juges d’instruction du parquet financier, une double plainte de Tabaski Ngom contre un de ses collaborateurs, établi à Ngékokh, Mor Guèye et contre le maire de Louga, alors son ministre de tutelle quand elle était l’agent comptable de l’Aprosi et avec qui, elle entretient des relations étroites. Mais, c’est en tant que Président de la coalition Farlu, explique Tabaski Ngom que Moustapha Diop, lui a demandé, lors des Législatives anticipées du 17 novembre 2024, un prêt de quelque 700 millions FCfa,  pour les besoins de financement de sa campagne électorale. Las d’attendre de rentrer dans ses fonds, elle porte plainte contre lui pour escroquerie. Cette saisine de la police judiciaire a toutefois eu un effet inattendu, précipitant l’arrestation de Tabaski Ngom. Déjà dans le collimateur du parquet financier suite à une plainte de la Commission de régulation du secteur de l’énergie (Crse) pour un détournement de près de 700 millions de FCfa, elle a voulu prendre les devants pour se soustraire à l’action judiciaire. Mais son initiative s’est retournée contre elle.

Moustapha Diop aurait pu éviter toute cette procédure…

Arrêtée par la Division des investigations criminelles (Dic) sur instruction du Procureur financier, El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, puis placée sous mandat de dépôt par le Président Idrissa Diarra Président du Collège des juges d’instruction, Tabaski séjourne depuis lors en prison en même temps que Mor Guèye. Interpellé par la Brigade de Recherches de Saly Portudal, le collaborateur de Tabaski Ngom a aussi cité Moustapha Diop dans cette affaire. A l’en croire, Tabaski Ngom, lui aurait remis des chèques pour qu’il les dépose non pas dans les comptes de la Crse, mais bien dans ceux de ses propres entreprises, Sen Setal et Web Sen. Poussant son argumentaire encore plus loin, Mor Guèye affirme que le montant total des chèques s’élevait à 681 millions F Cfa. Mais que Tabaski Ngom lui aurait signifié qu’une partie de la somme (243 millions FCfa) était destinée au député-maire, Moustapha Diop pour le financement de sa campagne électorale lors des Législatives de 2024. Moustapha Diop semble donc être une pièce maîtresse de ce scandale financier explosif. Avec la saisine imminente de l’Assemblée nationale par le ministère de la Justice en vue de la levée de son immunité parlementaire, son sort semble scellé. Des spécialistes du Droit estiment qu’il aurait pu éviter toute cette procédure en renonçant lui-même à son inviolabilité et en se présentant spontanément à la Dic. Mais à ce stade de la procédure, cette option semble trop tardive pour certains, encore envisageable pour d’autres.

MAMADOU SECK