Le collectif pour la défense des intérêts de Yène/Dialaw (collectif Dialaw), dans un document transmis à notre rédaction, accuse le Directeur Général (DG) du Port Autonome de Dakar (PAD), Monsieur Mountaga Sy, de spoliation foncière.
En effet, selon le document, il avait annoncé la semaine dernière le démarrage des travaux du Port à la suite de la levée des obstacles. Une propagande, selon le collectif qui accuse la Direction du Port de détournement d’objectifs dans ce projet. Voici le communiqué in extenso…
Le Directeur Général (DG) du Port Autonome de Dakar (PAD), Monsieur Mountaga Sy s’est adressé à la presse suite à un séminaire tenu à Saly sur le processus de démarrage des travaux du Port de Ndayane. Il annonce le démarrage imminent des travaux et dit, en substance, que tous les obstacles ont été levés : évaluation des impenses, notification du périmètre définitif, démarrage des conciliations, délivrance de l’attestation de conformité environnementale, rencontre avec les collectifs etc…
Cette communication est de la propagande et de la manipulation. Elle contient une série de contradictions et d’inexactitudes dans une tentative de masquer le tâtonnement et le manque de rigueur de l’administration sénégalaise sur la conception de ce projet. La réalité, à ce jour, est que plusieurs fronts de contestation et de résistance sont à l’œuvre pour dénoncer l’abus des autorités et le manque de transparence qui accompagnent ce projet de construction du port.
Le COLLECTIF DIALAW prend à témoin la presse et l’opinion publique nationales et internationales sur la vaste tentative de spoliation foncière en cours. Il y a un détournement d’objectifs dans ce projet, dont les besoins en terres sont successivement passés de 300 à 600 hectares, puis 1200 hectares, sans compter 600 hectares additionnels alloués à DP World. Et ce, dans l’opacité la plus totale et au mépris des droits des populations d’une zone d’habitations et d’activités socio-économiques multicentenaires. L’Etat, à travers ses divers démembrements impliqués, n’a pas respecté les procédures telles que prévues par la loi, comme le montrent les éléments ci-après :
Il n’y a pas eu de dialogue exhaustif avec tous les groupes de potentiels impactés. Le DG du PAD s’est choisi un ‘collectif de paille’, composé d’une dizaine de personnes dont les propriétés pourraient être extraites du périmètre du Port de Ndayane. Ce petit collectif, dirigé par M. Madiambal DIAGNE, sert de validation au processus et anticipe la construction d’un narratif pré-contentieux ;
Le DG du PAD, mis en avant dans la presse actuellement, n’est pas l’agent de l’Etat juridiquement habilité pour mener ce processus. Ce sont les gouverneurs des régions de Dakar et de Thiès qui sont compétents pour les conciliations. Et c’est le Directeur des Domaines qui est compétent pour la procédure d’expropriation ;
La procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique ne remplit aucune des formalités substantielles exigées par la loi. Les Préfets de Rufisque et de Mbour, ainsi que le Directeur du PAD, sont dans le délit en menant ces activités au nom de l’Etat;
Aucune notification n’a été faite aux potentiels impactés dans les règles de l’art. L’administration sillonne la zone et fait ses recensements avec une légèreté qui n’honore pas l’administration sénégalaise ;
Le tracé des limites du Port de Ndayane change tous les jours, au gré des affinités, foulant du pied la notion-même dite d’utilité publique, qui est avancée comme justification de la main mise sur les terres avoisinant les limites originelles du futur port ;
Le DG du PAD, ainsi que les préfets mobilisés pour l’aider à exécuter cette forfaiture, constatent, eux-mêmes, que l’écrasante majorité des impactés n’acceptent pas leurs propositions, faites dans le cadre de pseudo “Commissions de Conciliation”. La toute dernière sortie médiatique du DG du PAD est un déni de cette réalité ;
Contrairement aux affirmations du DG du PAD, la contestation n’est pas seulement liée aux montants des indemnités. C’est le détournement d’objectifs, et les procédures illégales et opaques utilisées, qu’elles rejettent. Réduire leur opposition à des motivations exclusivement financières traduit une méconnaissance profonde des réalités historiques, culturelles, sociales et économiques de la zone.
En outre, les populations refutent avec véhémence l’assertion du DG du PAD selon laquelle “95% des impactés sont du département de Mbour, 5% du département de Rufisque (280 sur 5.460 personnes) ». Du fait d’un déplacement insidieux des limites régionales entre Dakar et Thiès, ce qui contracte la commune de Yene (département de Rufisque, région de Dakar) et agrandi la commune de Ndayane (département de Mbour, région de Thiès), le futur port, en majorité sur le territoire historique de Yene, se trouve commodément à Ndayane.
Nous suspectons que ce “tour de passe-passe géographique” est fait à dessein pour enlever toute légitimité à la contestation des ayants droit à Yene.
Compte tenu de cet état de fait, les résolutions suivantes sont adoptées :
- Le COLLECTIF DIALAW met en demeure le DG du PAD et les autorités administratives qui lui servent de bras opérationnels, d’arrêter la désinformation et la manipulation et de cesser l’intimidation envers les populations. Le COLLECTIF DIALAW les somme de n’entreprendre aucune action sur les terres qui, à ce jour, appartiennent à des populations qui n’ont, jusqu’à présent, pas donné leur accord pour être déplacées.
- Le COLLECTIF DIALAW informe le Président de la République, M. Macky SALL, que les autorités administratives qui sont sous ses ordres, dont le DG du PAD et les Préfets de Mbour et de Rufisque, sont à la manœuvre d’opérations illégales, injustes, improvisées et attentatoires aux droits et à la dignité des populations. Le COLLECTIF DIALAW, qui joue un puissant rôle de régulation sociale, dénonce les déclarations irresponsables de M. Mountaga SY sur l’imminent démarrage des travaux, alors qu’aucun préalable n’est rempli.
- Le COLLECTIF DIALAW appelle les responsables de Dubaï Port World à faire preuve de lucidité face à cette situation injuste envers les populations impactées par le projet du Port de Ndayane. Les populations de Yene, Dialaw, et Ndayane refusent de se faire exproprier leurs terrains au mépris de la loi et de leurs intérêts. Nous nous réservons le droit de poursuivre cette procédure auprès de toutes les instances internationales habilitées,judiciaires comme arbitrales.
- Le COLLECTIF DIALAW reste à la disposition de la presse nationale et internationale pour fournir de plus amples informations sur le pilotage scandaleux, par l’Etat du Sénégal, de ce projet portuaire, qui exécuté de façon transparente, juste et équitable, pourrait impacter positivement l’économie de notre pays, ainsi que la prospérité des communautés hôtes. En tant que citoyens, nous ferons usage de notre plein droit à la contestation et à la résistance!